Projet Exode avec Canal+ : une journaliste en herbe en PES2.

par S Malhanche

Nous sommes actuellement mardi 10 janvier et nous assistons à une conférence sur le documentaire « Exode » qui traite du sujet des réfugiés.
Cette conférence se passe au lycée général Camille Claudel de Vauréal et a été organisée grâce à l’aide d’un professeur de sciences économiques et sociales, Mme Malhanche, afin de sensibiliser ses élèves sur ce sujet d’actualité.
Nous avons aujourd’hui trois invités spéciaux qui sont venus faire part de leurs connaissances et/ou de leurs expériences avec Jean Paul Chagnollaud, professeur de droit et de relations internationales, directeur de l’Institut de Recherche et d’études pour la Méditerranée et le Moyen Orient (iReMMO) ainsi que Diego Bunûel, directeur des documentaires de Canal+ qui a fait partie de toute l’organisation et de la production du documentaire et enfin Ali un jeune réfugié de Syrie actuellement en première année de droit à la Sorbonne.

Tout d’abord, la parole est donnée à Jean Paul Chagnollaud qui nous explique la situation de la Syrie actuellement et aborde selon lui les 3 points indispensables à la compréhension de cette situation qui sont :

Le système politique
Les circonstances (soit les révoltes et les répressions)
Les conséquences.

Le système politique.

Tout d’abord, il définit le système politique de la Syrie comme une dictature totalitaire et prédatrice.
En effet, c’est un système totalitaire puisque le gouvernement cherche à écraser la société en mettant les citoyens en prison pour n’importe quelle raison, ou en les torturant.
Comme par exemple lorsque des jeunes mineurs faisant des graffitis sur le murs ont été torturés à mort pour avoir écrit le mot « liberté ».
Ils font donc régner en quelque sorte « l’ordre » par la peur et la terreur.
Le peuple n’a donc aucune liberté et peut être torturé et/ou emprisonné pour quelconque raison.
On peut définir ce système aussi comme prédateur puisque qu’il consiste à supprimer l’organisation économique et politique afin de garder le pouvoir.
Il n’y a donc pas de citoyenneté.
En conclusion, les crimes contre l’humanité réalisés par le gouvernement de Bachar el Assad ont causé 300 000 morts en Syrie (soit l’équivalent d’1 million de morts en France, rapporté à la population).
La Syrie est constituée de communautés différentes telles que les Sunnites, les Chrétiens et les Allaouites qui sont en très petit effectif (10%).
C’est d’ailleurs ce petit effectif qui détient le pouvoir.

Les circonstances.

Rappelons le, la Syrie est un univers carcéral où règne la peur et où l’on ne peut pas résister.
C’est en 2011 dans le Sud (à Aguera) dans le contexte du printemps arabe que commence la révolte des syriens qui n’en peuvent plus de ce système dirigé par Bachar el-Assad.
Leur but était d’avoir de la dignité au sens politique et économique.
Le gouvernement répond par la violence et ne laisse aucune place à un débat politique menant à une militarisation de ces manifestations.
La terreur est telle que le régime utilise des bombardements et même des armes chimiques en août 2013 contre sa propre population ce qui est très représentatif de la cruauté de cette situation.

Les conséquences.

Cette situation amène effectivement à la destruction de villes entières dévastant des habitations et des foyers qui se retrouvent sans habitat ; d’ailleurs la moitié de la population syrienne a quitté son foyer (en Syrie ou en partant pour l’étranger).
La population syrienne subit une violence autant physique que morale par le pouvoir politique et endure également les conséquences dues au conflit entre Bachar El Assad, les rebelles et l’Etat Islamique.
Ces réfugiés ont 3 différentes destinations à prendre pour s’échapper de leur pays, soit vers le nord par exemple vers la Turquie puis l’Europe, soit vers la mer comme le Liban où résident actuellement 1 réfugié sur 2 ou encore vers le Sud comme par exemple l’Irak.
L’Europe d’ailleurs (excluant l’Allemagne) a eu une réaction peu honorable à l’arrivée de ces réfugiés avec des réponses allant jusqu’à fermer les frontières.

Nous assistons ensuite à un témoignage poignant de la part d’Ali.
Il nous explique que ce régime est devenu de plus en plus tortionnaire au fil du temps qui suivait la révolution. L’oppression commence au bout de deux mois suivant la révolution et se renforce de plus en plus jusqu’à frapper les citoyens à mort et les séquestrer.
Ali faisant des études de droit en Syrie nous explique que durant les sept premiers mois suivant cette révolution les universités et autres établissements d’études sont sous la pression du régime de Bachar.
Le gouvernement emmène des civils au hasard pour les emprisonner ou encore les torturer.
Ali nous raconte qu’il était sur la liste des prochains civils qui seront emmenés et que c’est pour cette raison qu’il quitta ses études et son pays avec son cousin pour aller en France et ainsi faire ses études à la Sorbonne comme il l’avait rêvé.
Il nous raconta son périple pour arriver en Europe, plus terrorisant les uns que les autres que cela soit par la mer ou encore par le désert partie la plus difficile, devant éviter en plus de leur gouvernement, Daesh questionnant tous les civils.
L’accueil des pays est très différent de l’un à l’autre ; Ali nous explique en effet que la Grèce et l’Allemagne sont des pays très accueillants comparés par exemple à la Hongrie où ils sont contrôlés par la police et emmenés parfois en prison .
En Allemagne, Ali décide de venir en France par les conseils d’un français, il est installé d’abord à Montmorency puis à Cergy et rencontre Mme Klein, Professeure de français au lycée qui lui enseigne le français et il s’inscrit ensuite à la Sorbonne avec des cours de français pour y apprendre la langue qu’il ne connaissait pas avant son arrivée.
Il entre à la Sorbonne et doit travailler le plus dur possible.
Il nous fait part de sa joie par rapport à la gentillesse de ses camarades qui l’aident à briser l’obstacle de la langue et l’accueil selon lui très chaleureux de la France qui prouve que celle-ci peut être accueillante pour certains s’ils tombent sur les bonnes personnes.
Ali réalise en quelque sorte le souhait de la plupart des réfugiés qui est d’être accepté et de pouvoir faire des études tout en continuant sa vie dans des conditions pour le moins « convenables ».
Il prouve aux réfugiés que s’ils se battent pour leurs rêves ils les atteindront avec un peu de chance et de motivation.
Cependant, ces réfugiés font partie des élites de leur pays puisque le voyage coûte extrêmement cher.

Après ce témoignage unique, c’est à Diego Bunuel de prendre la parole et de nous en apprendre un peu plus sur le fonctionnement du tournage du documentaire « Exode ».
Celui-ci nous raconte que ce documentaire a permis à lui et à d’autres personnes d’avoir une perception différente de ces individus, de se sentir plus proche d’eux et de comprendre tout ce qu’ils ont enduré afin de venir ici.

En effet, nous pouvons tous constater que des milliers de réfugiés sont venus en France et sont par exemple assis dans les rues trouvant des solutions pour améliorer leur situation pour tout simplement continuer à vivre.
Pourtant bien peu d’entre nous, altruiste ou non, se soucient d’eux ; par peur de l’ « inconnu », parce qu’ils ne se rendent pas compte de ce qu’il se passe autour d’eux et de ce qu’ils ont bien pu vivre, par peur de prendre des initiatives ou tout simplement bien trop pressés par le temps ou encore bien trop concentrés sur nos téléphones à consulter nos nouvelles notifications sur Facebook pour se rendre compte de ce qui nous entoure.
Pourtant, ils sont bien là et ont besoin de se faire entendre, d’être aidés et d’être surtout compris.
Effectivement, ces réfugiés syriens sont partis de leur pays pour une question de vie ou de mort.
C’est ce que « Exode » cherche à nous faire comprendre.
« Exode » c’est un documentaire produit par Kéofilm et CANAL+ dont le principe est de donner 100 caméras à 100 migrants afin de suivre leurs parcours et de comprendre un peu plus leurs situations.
Ce documentaire, nous explique Diego Bunuel est réalisé selon différentes formes avec le témoignage studio où l’on va pouvoir avoir les ressentis de ces migrants, les journalistes qui suivront les migrants dans leur quotidien (hormis pour certains endroits inaccessible pour ses caméras) et enfin des caméras embarquées qui leur permettront de se filmer eux mêmes et de nous montrer en direct leur périple sans aucun effet, rien que la dure réalité.
Hassan un jeune réfugié syrien venant de Damas est d’ailleurs le seul des migrants dans ce film à n’être seulement filmé par la caméra embarquée, en effet nous explique Diego Bunuel celui-ci ne faisant pas partie des 100 migrants sélectionnés pour le documentaire a pris en vidéo tout son voyage de son propre gré, conscient que son expérience serait quelque chose qu’il devrait faire partager.
Le montage de ce documentaire consiste à faire éprouver au spectateur des émotions allant des rires aux larmes.
Peut-être que la vision de ce documentaire vous sensibilisera un peu plus sur le fait de l’immigration et vous fera vous aussi changer votre perception.
Effectivement, ces personnes là ont besoin de nous, ne serait-ce qu’un sourire leur redonnerait l’espoir de jours meilleurs et peut être atteindre leur objectif comme pour Ali.

Après cette conférence riche en émotions et en apprentissages, les élèves intéressés ont posé des questions aux 3 intervenants.

Un élève posant une question destinée à Ali :

« Aimeriez vous retourner en Syrie si la situation s’améliore »

Ali : « Oui j’aimerais retourner en Syrie mais d’abord je voudrais terminer mes études »

« Votre famille vous a-t-elle rejoint en France et si non en a-t-elle envie ? »

Ali : « Non, ils ne veulent pas venir.. »

Un élève posant une question destinée au professeur de droit Jean Paul Chagnollaud :

« Qu’est ce qu’un Allaouite ? »

Le professeur : « Ceçi est une question très compliquée mais pour résumer, en 1920 les états sont divisés par la France et la Grande Bretagne conduisant une révolte remportée par la France en 1922 qui dessina les territoires ce qui amena à différentes communautés avec les musulmans (constituant 90% de la population en Syrie), les chrétiens (avec 10% de la population syrienne) et les Juifs (présents en Irak mais pas en Syrie) .
Ainsi dans la forte communauté que sont les musulmans on distingue deux identités ; les Sunnites (représentant 80% de la population syrienne) et les Chiites (constituent à l’intérieur de celle-ci des Allaouites qui sont en minorité mais tout de même au pouvoir) attention cependant à ne pas tous les généraliser puisqu’ils ne soutiennent pas tous fortement le régime. »

Un élève posant une question destinée à Diego Bunuel :

« Comment avez vous fait pour donner ces 100 caméras, et les avez vous aidés durant leur « voyage » ?

Diego Bunuel : « Nous nous sommes rendus dans des camps de réfugiés comme par exemple en Turquie et leurs avons posé des questions ensuite nous leurs avons expliqué le concept.
Nous ne les avons pas aidés financièrement ni d’aucune autre manière, nous voulions qu’ils se débrouillent par leurs propres moyens et ainsi avoir un témoignage le plus réel qu’il soit.
Cependant l’utilisation du téléphone portable est important pour sauver des vies puisque nous avons pu par exemple grâce à un des migrants que nous suivions sauver un bateau au bord du naufrage puisque celui-ci nous a appelés pour nous prévenir que le bateau de sa sœur était en train de couler et c’est ainsi que l’on a sauvé des vies avec l’aide de Médecins sans frontières.

« Comment faisiez-vous lorsque des migrants étaient emprisonnés, les avez-vous aidés ? »

Diego Bunuel : « Non, nous ne les avons pas aidés tout simplement parce que nous n’avions plus de nouvelles d’eux et ne savions pas où ils étaient, les pays voisins profitent de ces crises et guerres pour gagner de l’argent, ce qui fonctionne ».

Lisa Samé journaliste de la PES2.